MAJ > Comprendre la lutte antidopage en WTC – Ironman.

Kona n’a pas échappé à la spéculation. Après le forfait d’un de ses pros à la dernière minute et l’amaigrissement surprenant (ou pas) de certains des pros, la machine à rumeur s’est emballée. La ressemblance avec le cyclisme était frappante. On a aussi récemment vu des athlètes capables d’enchainer des ironmans avec très peu de récupération.

On vous rassure, le but de cet article n’est pas d’accuser mais plutôt d’essayer à éclaircir un peu le paysage puisque selon les dires de certains, tout est noir. D’ailleurs, on doit avouer, que vous êtes nombreux à nous questionner sur l’existence des contrôles anti-dopage en Ironman et on se rend compte que les commentaires qui circulent sur Facebook sont très souvent loin de la réalité.

Alors on va essayer de vous expliquer la situation. On a questionné une douzaine de pros français et américains afin de déchiffrer le système qui semble être assez inégal.

Chez Trimes.org, ce qui nous gène est avant tout le discours généraliste qui a tendance à faire que tous les triathlètes élites sont dopés. En fait, on devrait surtout voir la chose différemment. Si un dopé connu comme Michael Weiss, Lance Armstrong ont été capables de dominer aussi facielemt le sport et le vélo, cela signifie probablement que les autres sont propres, sinon les écarts seraient minimisés.

Constat.
 La problématique avec le dopage est que si l’athlète lambda pense qu’il n’y a aucun risque de se faire attraper, il a forcément des grandes chances à ne pas résister à la tentation surtout lorsque, certains amplifient le phénomène ou l’athlète se demande s’il n’est pas le seul à être propre. D’après nos connaissances, les performances en ironman restent dans le raisonnable et avant de juger, il est important de se poser les bonnes questions.

Lorsqu’un ancien cycliste arrive en ironman et domine dans la discipline du milieu, personne ne s’insurge de voir Melissa Hauschildt ridiculiser les autres filles puisqu’elle est une ancienne coureuse de piste. On a donc tendance à juger nos athlètes en fonction de leur origine et malheureusement tous ces anciens VTTistes nous mettent face à une généralité dont certains lobbyistes veulent rendre acceptable.

C’est toujours la même chose. Les valeurs du sport ne sont pas les mêmes pour tous. Certains veulent gagner à tout prix et d’autres y trouve un moyen de vivre à fond. À force de valoriser uniquement les gagnants, on est tous un peu responsable de ce système. Un exemple parfait, en ironman, c’est avant tout les qualifiés pour Kona qui réussiront à vivre de leur sport. On a récemment vu que des grandes marques préfèrent se concentrer uniquement sur des gagnants et refuser son rôle de support pour le talent émergent.

Récemment, il y a eu le cas de Virginia Berasategui qui a été contrôlée positive à un triathlon local ou elle n’a surtout jamais pensé s’y faire tester. Ou encore à Michael Weiss qui était un peu trop proche du peloton autrichien et qui est tombé parce qu’il s’est fait dénoncer et non par un contrôle positif (4e à Las Vegas et de gagner Xterra World en 2011). Avec son retour gagnant à Cozumel, il nous rappel que tout n’est pas propre dans ce sport et que la WTC n’a surtout pas le choix de les ré-intégrer dans le sport après la fin de leur sanction.

Il ne faut pas oublier que le triathlon est un sport d’endurance. Cela signifie qu’il y a un avantage à se doper durant la préparation et précisément pendant les mois d’ hiver et non juste avant une course.

Un athlète dopé pourra augmenter sa charge de travail à l’entrainement et donc en garder les bénéfices et, l’été venu, les traces de substances auront totalement disparues.

Des récentes études viennent aussi prouver que le dopage aurait des effets permanents sur le comportement de vos muscles. En traduction, vous avez modifié votre organisme pour presque toute la durée de votre carrière sportive. Il est difficile de savoir plus précisément la grandeur de cette moyen de tricher puisqu’il est tout simplement impossible de faire ces études sur des athlètes.

On pourra se rassurer en croyant que la WADA sera capable de développer un test permettant de détecter la prise d’EPO et autres produits, puisque certains marqueurs seraient permanent puisque la prise de ces produits augmente le nombre de cellules cancéreuses.

Donc, un contrôle chez un AG ou un PRO après une course n’a donc que très peu d’intérêt sachant qu’un tricheur prévoyant sait qu’il a une grande probabilité à ne pas être testé, ou cela sera sera tout juste avant ou après une course et donc très prévisible. Les tests chez les AGs sont souvent très médiatisés lorsqu’ils ont lieu, on peut pourtant se questionner sur leur efficacité. Ces tests pourraient simplement séparer le débutant au pro du dopage.

On vous rappelle que si vous êtes qualifié pour un championnat mondial, vous acceptez que la WTC puisse faire des contrôles en dehors des courses, il est pour eux impossible de vous localiser en dehors des courses. Évidemment, il y a eu quelques exemples chez les AGs comme le fameux cas de Kevin Moats (L’homme au rétroviseur) qui s’est fait prendre certainement sur dénonciation.

Donc, pour lutter efficacement contre ceux qui se dopent pendant leur préparation, le cyclisme a développé le passeport biologique et surtout, ils multiplient les tests hors compétition (ooc). Ils doivent donc se soustraire au système ADAMS. Cela signifie que l’athlète doit sans cesse rapporter ses déplacements, ou il séjourne ainsi que les différents imprévus. Ce système est très contraignant pour les athlètes. Il est aussi très dispendieux pour les agences puisque certains athlètes se retrouvent souvent dans des coins de pays très éloignés. Il existe aussi le mythe d’athlète qui s’entraine sur une ile et qui sait qu’il n’y a que deux traversiers par jour. Où les camps trop isolés sachant qu’il faut très rapidement tester les échantillons pour trouver certaines substances….

ADAMS permet donc d’aller contrôler l’athlète à n’importe quel moment pendant ses plages horaires et si l’athlète n’est pas présent, il recevra un avertissement et une sanction après 2 absences.

La très bonne nouvelle est que la WTC travaille avec la WADA soit l’agence mondiale anti-dopage et impose donc ADAMS et le passeport biologique à ses meilleurs athlètes. On parle d’un « testing pool » de 52 athlètes. Soit les meilleurs athlètes sur Ironman mais aussi sur 70.3.

Il est important de comprendre que dès lors qu’un athlète à du succès sur le circuit comme Del Corral, il devra forcément se faire ajouter sur le pool. 

C’est un programme qui est extrêmement onéreux. D’ailleurs lorsque la WTC a demandé aux pros de payer pour leur carte (qui était gratuite avant), ils ont justifié ce choix afin de financer la lutte contre le dopage.

D’ailleurs pour 2014, la WTC a décidé d’augmenter la cotisation. On espère donc que cet argent additionnel ira dans la lutte.

Évidemment, il existe beaucoup de questionnement avec la WTC. Étant une corporation, certains mettent en doute leur volonté à attraper des stars et risquer de subir impact négatif sur sa popularité. On se demande d’ailleurs toujours si cela pourrait faire fuir des amateurs à leurs courses.

De plus, certains ne comprennent pas comment la WTC peut tester 120 cas à Kona sachant qu’un test coute environ 800$. Cela donnerait une facture de 100 000$. Difficile à avaler lorsqu’on à l’impression qu’ils ont fait des coupures dans la webdiffusion.

Il ne faut jamais oublier que la WTC étant signataire de la WADA, elle donc suivre les règles de l’agence mondiale. Si la WADA considère les efforts non crédibles, rien ne l’empêche de casser leur entente. Dans le passé, elle a déjà montré publiquement son désaccord avec l’UCI. 

Alors, 52. Est-ce assez pour être efficace? Évidemment, le programme est très couteux sans compter les frais de déplacement d’un chaperon pour un test inopiné et hors compétition. La WTC ne peut donc pas avoir tous les athlètes et si on regarde les listes, aucun favori n’est absent.

Prenons le cas de Kona.
 Les 5 premiers sont tous dans le « pool » de la WTC. Par contre les 5 suivants ne le sont pas, (Rana, Timo Bracht et Faris Al-Sultan).

Alors qui surveille les athlètes qui ne sont pas sur le pool? 
En fait, ils sont pris en charge par leur fédération nationale et donc leur agence anti dopage nationale. Cela signifie que la qualité des contrôles est en fonction de plusieurs critères.

La fédération, il existe deux cas, celles qui reconnaissent les longues distances (70.3/IM) ou pas.

La fédération américaine contrôle énormément ses athlètes et leur impose ADAMS. Elle ne fait pas la distinction entre ITU et Ironman, il faut avant tout comprendre que l’USAT reçoit beaucoup d’argent des courses non ITU et c’est donc un service rendu aux organisateurs.

D’après nos discussions avec des pros américains, ils ont la perception que les athlètes européens sont très suivis. Les allemands seraient très testés, ils pensent d’ailleurs la même chose des français.

Dans la réalité, les Pros français (qui n’ont pas fait d’ITU) ne sont tout simplement pas suivis. Les seuls tests qu’ils ont subis étaient ceux des organisateurs, avant la course comme, à Frankfurt ou après lors d’une bonne performance.

Un élite français qui est sur l’équipe de France ITU pour la longue distance se verra imposer ADAMS. Cela devrait donc inclure des athlètes comme Cyril Viennot, Bertrand Billard etc…

Pour les autrres, il n’y a donc pas de contrôles hors compétition et il est d’ailleurs impossible de les retracer. Malheureusement, à cause de cette perception des français ultra contrôlés, la WTC ne semble pas avoir détecté cette défaillance et retombe sur ses pieds uniquement si l’athlète est sous dans le système fédéral.

D’ailleurs, on a appris que l’UKAD, soit l’agence anti dopage britannique avait récemment abandonné la surveillance de ses athlètes en longue distance. Dans ce cas, la WTC a rapidement inclus ces athlètes comme Rachel Joyce et Leanda Cave.

Et le Canada? C’est un peu malheureux mais, il semble aussi n’y avoir aucun test. Par contre nos meilleurs athlètes ont été ajoutés au « pool » de la WTC. Certains de nos pros qui se sont qualifiés pour les championnats du monde de 70.3, non tout simplement jamais été testés.

À titre de comparaison, nos athlètes en ITU canadiens sont très contrôlés. Un athlète qui représente le Canada dès U23 se fera imposer ADAMS et même si son calendrier n’inclus pas des WTS.

En conclusion, la lutte contre le dopage en Ironman existe. Malheureusement la qualité du contrôle dépend avant tout de la volonté des fédérations puisqu’il est impossible d’exiger de la WTC d’ y inclure tout le monde. Le but de cet article n’est pas de dire que le dopage est généralisé mais plus de souligner le fait que les efforts sont en fonction des volontés des fédérations nationales.

 

9 commentaires
  1. aujourd’hui les groupes d’ages sont de plus en plus performants ils ont meme le niveau pour etre pro et vu la maigreur qu’ils affichent lors des compétitions c’est trés etonnant qu’ils ne soient pas malades ils doivent etre suivis de très pret je pense.

  2. Je suis un modeste IRONMAN à 10h52 à 55 ans ; j’étais à Frankfort ; j’ai eu la surprise de voir mon nom affiché lors du briefing pour passer au contrôle antidopage. Surpris et content de constater que celà existe à tout age car souvent … j’ai des doutes sur certaines performances stratosphériques ! . Je me suis rendu au lieu indiqué . Arrivé avec 10 mn de retard, on m’a dit :  » tant pis , on fait pas, c’est bon » . Donc, il y a l’affichage mais pas encore la volonté profonde. Il faut contrôler les Gpa aussi de manière aléatoire .

  3. Salut à tous,
    Afin de mieux comprendre les rouages du dopage , il faut absolument lire le livre de Tyler, alors on comprend mieux que le dopage est une spirale infernale. Comme le souligne très justement Alex, l’hiver est long et l’usage d’EPO en micro dosage est facile à camoufler.
    Bonne lecture.

    1. Tu rêves un peu, l’accès à l’epo n’est pas si facile, et vu qu’il n’y a pas de contrôle pas la peine de faire de micro-dosages^^

      1. C’est certain que l’EPO est pas aussi rependu… mais bon vu le revenu moyen d’un triathlète américain (+100k$). Il ne faut pas oublier qu’il y a plein de formes de dopage… faudrait pas oublier le champion UFOLEP qui était sur la corticoide.

  4. Pour compléter le commentaire de Skiel, et qu’en est-il des anciens pro qui ont pu avoir des pratiques dopantes et qui cours maintenant en GA, ils gardent un super niveau pour certains…
    Moats est dans la liste des 52, il veut faire amende honorable je suppose !
    Bon article quoiqu’il en soit !!