L’importance de la technique lors des sorties longues

Tous les triathlètes intègrent dans leur programme, à un moment ou un autre, des sorties longues en course à pied. Le « motto » de ces sorties est de garder sa fréquence cardiaque basse. Certains connaissent la formule du Dr Maffetone qui recommandent de rester durant la plus grande partie de son entraînement à une fréquence de 180 moins son âge (avec plus ou moins de pondération). C’est un exemple parmi beaucoup d’autres des fréquences basses recommandées par énormément d’entraîneurs et de plan d’entraînement pour les sorties longues.

Ce qui arrive le plus souvent, quand on commence à intégrer de telles séances dans son entraînement, c’est qu’on est obligé de courir vraiment lentement pour rester dans la zone de fréquence cardiaque conseillée. Pour la plupart des athlètes moyens, cela signifie souvent des vitesses inférieures à 12km/h, se situant plutôt autour de 10 à 11km/h, voire parfois moins. A de telles vitesses, le coureur a malheureusement tendance à laisser tomber toute préoccupation technique au sujet de sa foulée. Il se console peut être en se disant que la technique, il la travaille lors de ses séances de VMA (qui sont elles aussi quasiment toujours présentes dans les plans d’entraînement) et peut être aussi lors des séances au tempo (et encore).

Une telle approche pose de réels problèmes et risque de s’avérer vite contreproductive pour le coureur : en effet,

– en termes de pourcentage de temps d’entrainement, le coureur va passer la plupart de son entraînement à courir sans du tout se préoccuper de sa technique (puisque par définition le pourcentage de temps consacré à travailler à allure lente et basse fréquence cardiaque est le plus important par rapport à l’entraînement global) ;

– Courir à basse vitesse sans se préoccuper de sa technique va impliquer pour le coureur une perte d’efficacité et de rendement dans sa foulée. Sa cadence de foulée va ralentir, sa pose de pied va se détériorer, sa posture générale également. C’est tout son système neuromusculaire qui va ainsi s’habituer à une foulée très pauvre techniquement avec, en général, une faible mobilisation des muscles posturaux.

– A une vitesse de 10 à 11km/h, le coureur se trouve dans une zone qui se situe entre la marche et la course à pied ; une foulée de type coureur-marcheur fonctionnera très bien, voire même s’imposera si le coureur n’y fait pas attention. Il est fort probable que cette foulée conduise l’athlète à ne plus solliciter ses muscles profonds qui sont ceux dont il aura besoin le jour de la compétition pour justement garder la meilleure posture possible jusqu’à la ligne d’arrivée.

En conclusion, on ne peut que recommander aux athlètes de travailler leur technique en particulier lors de leurs sorties longues ; ce travail technique n’est pas très compliqué ; il peut se focaliser sur les points principaux suivants :
– La cadence,
– La posture générale,
– La pose de pied,
– L’utilisation des bras en bonne coordination avec le bassin.

Grâce à cela, le coureur pourra limiter les effets dévastateurs techniquement des sorties longues et très lentes.

 

S. Séhel

auteur de « Courir Léger – Light Feet Running » et du « Guide du Crawl Moderne »

3 commentaires
  1. Article intéressant mais j’apporte quelques bémols: ne se référer qu’à des FC est une ineptie. Quand on regarde les valeurs de FC max et donc la cascade de fc intermédiaires, on se rends compte que le 180-âge est tout aussi contre-productif.

    Le facteur technique sur de basses vitesses est-il si nécessaire à 10km/h? Une pose sur l’avant pied ou pied à plat met en jeu comme tu le fait remarquer des muscles profonds, des muscles de maintien de la cheville qui ne sont pas forcément nécessaires sur des allures où le facteur musculaire élastique est réduit à néant par une faible horizontale.
    La question serait plutôt: une pose de pied dynamique est-elle nécessaire sur une sortie lente où on recherche une économie gestuelle pour durer longtemps?
    Pas sur…les sorties à des allures situées entre l’allure semi et les sorties à SV2 sont plus indiquées, non?

  2. C’est sans compter qu’une lente dégradation technique peut être risqué sur le plan physique, notamment dans un risque de blessure. En gros, on risque d’assimiler sur une sortie longue un défaut qu’on peut mettre quelques mois à effacer.

    Mais dès lors je pose une question. Si on veut s’imposer une sortie longue à faible FC (pour la capillarisation des tissus, l’amélioration de la combustion des graisses etc…), que pensez-vous d’une sortie longue sur le thème alternance marche / course. En gros, l’athlète focusse sur la technique durant un court laps de temps puis marche pour faire redescendre ses FC ?

  3. Je ne suis pas d’accord du tout. Avez vous jamais vu des Kenyans courir leurs jogs? C’est un shuffle, pas du tout le même technique qu’ils font dans la course. Par contre, il me semble que cela leur donne rien du mal… La dégradation technique n’est pas la cause des blessures. La cause des blessures est un « load » trop élever pour le corps. Ceci peut arriver même avec un « bon » technique. Vous n’auriez certainement pas de blessure pour avoir couru « trop lentement. » Je n’ai jamais entendu ça de ma vie dans le monde d’athlétisme. Non, pas vrai: c’est correct quand on parle des sprinteurs. Mais même pour un demi-fondeur, les gains de courir beaucoup, mais lentement, sont beaucoup plus élevés que les risques de changement de technique. En effet, normalement, les gens courent trop vite, ce qui risque d’élever le « load » (désolé je ne trouve pas le mot français en moment) et faire que l’athlète ne soit pas récupérer pour un session plus intense dans les journées qui suivent. Ce concept est une des plus grandes raisons pour laquelle les Africains dominent les euros et les nord américains. Il y en a dans ces deux derniers mondes qui ne comprennent pas l’importance de courir très facile, et beaucoup. Les Brownlees le saient, par contre…