Ça prend quoi? > on analyse la perf’ vélo de Bertrand Billard à Aix-en-Provence 70.3.

Bertrand Billard est l’un des rares triathlètes pro à mettre à disposition sa fiche de puissance. Et évidemment, ce n’est pas parce que vous connaissez ces chiffres que vous pourrez les répliquer.

Quelques jours avant la course, Nicolas Billard, son frère et entraineur, lui avait généré une simulation avec les prévisions du vent de la journée sur Best Bike Split. Cela a permis à Bertrand de se faire une vague idée des temps à réaliser. Sans oublier qu’il avait déjà gagné cette course en 2014. Il nous avouera au final ne pas avoir respecté à la lettre le plan dicté par les différents calculs, préférant se fier à ses sensations. En fin de compte, il réalisera un temps vélo de 2:14.

Évidemment, pour faire une bonne estimation, il faut appliquer les bonnes données. Le clan Billard a donc parié sur un effort de 167 TSS pour un facteur d’intensité de 88% (FTP de 380 W).

BBS

VENT

Pour voir les détails de la simulation.

Un effort différent…

L’annulation de la natation provoquant un départ des pros toutes les 20 secondes a changé la donne. On n’est plus sur une course avec un plateau pro très dense où il faut gérer son effort en fonction des autres. Son frère nous confiait que c’était de loin son effort à vélo le plus abouti depuis le début, que ça venait du fait qu’il avait tout fait tout seul, donc gestion solitaire…

Bertrand est parti 6e de la course. Soit 2 minutes après le premier. En doublant tous ceux qui étaient devant, le sociétaire de Triathl’aix avait le sentiment d’être en tête de la course. Son départ s’est donc fait en conséquence. 


Voici les vrais chiffres.

Puissance moyenne 313 watts
Puissance normalisée 323watts
facteur d’intensité de 85%
TSS 170.
Durée totale de 2:14:35.

Bertrand utilise comme capteur de Puissance le Rotor InPower. (mesure effectuée sur sa jambe gauche). 


Évidemment, il existe un écart de 3 minutes entre la simulation et le temps réel. Plusieurs éléments doivent être pris en considération. Même si le vent est bien dans le calcul, étant sous forme de bourrasque, cela génère des décélérations et altère la fiabilité de l’estimation. De plus, cela force Bertrand à sortir de sa position aérodynamique à plusieurs reprises (vent latéral). Et avec tout cela, il ne faut pas oublier la température qui était particulièrement fraiche. 

Dans la comparaison, il faut bien comprendre que Bertrand a été plutôt conservateur, puisque sa puissance normalisée est inférieure de 10 watts et que malgré plusieurs accélérations au-dessus de son FTP, il maintient une variabilité d’intensité de 1.03 soit en-dessous de la limite conseillée de 1.05. 

La gestion de l’effort.

La ligne verte représente la puissance moyenne. Contrairement aux croyances, sur ce type de parcours avec du dénivelé, il faut savoir varier son effort. Dans les descentes, maintenir une puissance peu souvent être inutile, il est préférable d’attaquer le sommet pour en suite récupérer tout en se concentrant sur ses courbes et maintenir une position très aéro. Dans les montées, c’est le phénomène inverse, augmenter sa puissance est le plus payant. 

perfligne

 

Il est donc intéressant d’analyser sa puissance avec le profil et la puissance moyenne. La logique est simple, dans les montées, l’athlète devrait être au-dessus de sa puissance moyenne et dans les descentes et plats, en dessous.

Mais voilà, il y a certains éléments à prendre aussi en considération. Bertrand prend un départ très agressif, il passe la première minute à plus de 450 watts. Ses séquences dans ses efforts ne respectent pas totalement le dénivelé. 

Au total, Bertrand utilisera 4 allumettes (efforts anaérobiques).
38s à 446 watts, 50s à 470 watts, 13s à 585 watts et 17s à 550 watts.
Ces efforts correspondent dans certains cas à des dépassements comme celui de David McNamee en début de course. Pour un amateur, c’est généralement à proscrire. Ces courtes séquences viennent augmenter artificiellement la valeur de votre puissance normalisée. 

Cet épisode le placera momentanément dans le dur. À mi-course, il n’augmentera pas son intensité pour la seconde ascension (moyenne 318 watts).

Comme Bertrand l’avait annoncé avant la course, il savait que les derniers 30 kilomètres allaient être déterminants.

À cause de l’arrivée tardive de la montée dans le parcours, mais aussi pour vent de face. Il effectuera la dernière ascension à 363 watts de moyenne pour un effort de 10 minutes. C’est probablement à ce moment qu’il creuse le plus d’écart sur ses adversaires.  

 

 

 

Et la comparaison?

À titre de repère, il est intéressant de se fier à la ligne rouge. Elle correspond au W’ (à prononcer W prime). Elle exprime les réserves anaérobiques restantes. Lorsque vous diminuez l’intensité de votre effort, vous récupérez de l’énergie. Cela correspond à votre état de fatigue. Si un athlète est vidé, il atteint son point de rupture (fatigue non fonctionnelle).

Dans le graphique de la simulation, on voit effectivement que l’investissement est différent. La mise en action se fait même en dessous de la moyenne, ce qui n’est pas le cas pour Bertrand.

Best Bike Split recommandait aussi d’être plus aggressif entre la seconde et la troisième montée. C’est probablement sur ce passage que Bertrand aurait pu optimiser encore plus son effort.

Dans les faits, il accusait encore la fatigue de la seconde ascension. La courbe du W’ le temoigne. Bertrand a du continuer à récupérer afin de mieux se préparer pour la dernière montée et continuer à appliquer un plan établi.

BBS

 

 

 

 

 

En conclusion, une bonne gestion d’un effort à vélo passe part une bonne compréhension de ses capacités. En connaissance, l’athlète sera plus en contrôle de ses capacités et augmentera ses chances d’effectuer une performance à la hauteur de son potentiel.

Même si Bertrand a géré son effort selon ses sensations du jour et son environment, on remarque que l’ajustement de ses efforts se fait naturellement. Aix-en-Provence est un parcours compliqué à gérer et sans ses acquis, il aurait pu s’avérer très difficile à maitriser.

Pour un athlète de ce niveau, il se doit de faire un travail de recherches et de stratégie. Comme l’illustre très bien son fichier, Bertrand a su mettre en place une stratégie payante en doublant rapidement ses adversaires et en attaquant dans le dernier tiers. Il a tout simplement appliqué un plan annoncé avant la course. C’était la recette du jour.

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