Manon Létourneau —> Résumé de son périple en Europe

Voici le résumé du périple en Europe de Manon Létourneau. Rappelons qu’elle a participé à la Coupe du Monde (WC) de Tiszjauvaros en Hongrie et au Championnat du monde sprint (WCS) à Lausanne en Suisse. Elle nous raconte cette expérience enrichissante pour la suite de sa carrière.

Bien que ma saison ne soit pas encore terminée, je peux déjà affirmer que 2011 fût une saison de premières pour moi : premier podium ITU à la Coupe panaméricaine d’Ixtapa au Mexique, premier départ en Coupe du monde à Edmonton, première compétition en Europe à la Coupe du monde de Tiszjauvaros en Hongrie, premier départ en WCS et première participation au Team Relay, toutes deux à Lausanne en Suisse.

Avec le recul des derniers jours, j’ai pris le temps de repenser à tout ce que j’avais vécu cette année et j’ai réellement pris conscience du chemin que j’ai parcouru. Bien honnêtement, en janvier dernier, si quelqu’un m’avait dit que je prendrais part à tous les événements auxquels j’ai participés cette année, je ne l’aurai fort probablement pas cru. Je l’aurai même trouvé plutôt irréaliste et déconnecté… Certes, l’un de mes principaux objectifs pour 2011 était d’atteindre les standards exigés par Triathlon Canada pour être éligible à prendre part aux Coupes du monde (WC) et aux courses de la Série des Championnats du monde (WCS), mais je ne réalisais pas à quel point l’atteinte de ces standards allait me permettre de vivre autant de nouvelles expériences de compétition à un niveau supérieur. À mon sens, seule la WC d’Edmonton était à ma portée cette année étant donné que le Canada était le pays hôte. Comme vous avez pu le constater, j’étais loin d’envisager la possibilité de compétitionner en Europe, et encore moins celle de prendre part à une compétition faisant partie de la WCS! Cependant, bien heureusement pour moi (!!), les choses se sont passées autrement de ce à quoi je m’attendais et j’ai eu la chance de vivre de riches expériences en Europe dans les deux dernières semaines.

Tiszjauvaros WC

Mercredi 10 août 2011, 14h00

Départ de Québec vers l’aéroport de Montréal d’où je m’envolerai pour la Hongrie!

Jeudi 11 août 2011, 16h00

Arrivée à l’hôtel Veronika de Tiszy! La course étant le 14 août, je n’ai que quelques jours pour m’adapter à l’heure d’ici (+6,00h par rapport à Québec) et être prête à « racer »!

Dimanche 14 août 2011, 10h30

C’est le départ! J’ai d’ailleurs connu un très bon départ à la natation. Bon positionnement derrière des pieds rapides, et ce, pendant les 200 premiers mètres. Cependant, la suite ne s’est pas déroulée exactement comme je l’aurais souhaité… En arrivant à la première bouée qui était à 340 mètres, plusieurs filles m’avaient dépassée. Il n’y avait toutefois rien d’alarmant puisque je me trouvais toujours en bonne position dans le gros peloton. C’est après le virage de la deuxième bouée que les choses se sont gâtées… J’ai reperdu plusieurs positions sur cette ligne droite de retour vers le ponton, me reléguant ainsi à la toute fin du peloton. À ce moment, je savais que j’allais devoir connaître un bon deuxième tour afin d’être en mesure de rester accrocher au peloton. Malheureusement, ce n’est pas tout à fait ce qui est arrivé… J’ai perdu les pieds qui étaient tout juste devant moi et j’ai nagé mon deuxième 750 mètres à environ 5 mètres derrière les dernières filles du peloton… Tout au long de cette portion de natation, je n’ai pas trop compris ce qui m’arrivait… Contrairement à mon habitude, je me sentais calme et en contrôle de ce que je faisais, mais je me sentais incapable d’aller dans une zone d’intensité plus élevée. Je sentais que j’avais une « gear » supplémentaire pour accélérer, mais j’étais incapable d’aller la chercher… Je ne m’étais jamais sentie comme cela auparavant. Je me sentais amorphe, à plat, comme sur un pilote automatique ou comme si je manquais de vivacité ou d’activation. C’était vraiment étrange comme sensation… Peut-être était-elle due au décalage horaire… C’était ma première expérience de compétition en Europe, alors il était difficile de prévoir comment mon corps allait réagir. Peut-être aurais-je dû arriver une ou deux journées plus tôt? Je ne sais pas… Ce que je sais, c’est que je me sentais vraiment bizarre dans l’eau et que je n’ai pas aimé ça.

Malgré cela, j’ai tout oublié en sortant de l’eau et j’ai réussi à avoir un bon début sur le vélo. Il y avait plusieurs filles devant moi et j’ai travaillé fort pour les ramener. Malgré le fait que les dernières filles du peloton principal n’étaient vraiment pas loin, j’ai décidé de rester avec celles que j’avais rattrapées. Sur le moment, j’ai pensé qu’il y aurait plus de chances que nous remontions en unissant nos efforts que si je tentais de travailler en solo, mais j’ai eu tord… Nous étions malheureusement désorganisées et nous n’avons pas été en mesure de rejoindre le groupe devant nous. Dans les circonstances, je suis tout de même satisfaite de mon effort sur le vélo, car j’étais constamment à l’avant du peloton.

À la course à pied, je me sentais bien dès le début. Contrairement à mes courses précédentes cette saison, j’ai réussi à bien courir en contrôle dès le début. Pendant le premier 5km (2 premiers tours), je suis restée avec 2 filles de mon peloton et je me sentais drôlement en contrôle. Au 3e tour, j’ai décidé de partir. J’ai donc augmenté mon effort et accéléré. Je me suis détachée des filles avec qui je courais et j’ai commencé à voir certaines filles devant. Cela m’a motivé davantage et, graduellement, j’ai réussi à en dépasser quelques-unes jusqu’à la fin pour finalement terminer en 39e position.

Pour conclure sur cette expérience en Hongrie, je dois avouer que mon feeling bizarre dans l’eau me laisse un goût amer. Je n’ai toutefois aucun regret puisque j’ai tout donné ce que je pouvais et j’ai travaillé fort du début à la fin. Je suis consciente que je suis encore en apprentissage et qu’il m’en reste énormément à apprendre. Je brûlerais donc beaucoup d’étapes si je m’attendais à des miracles dès maintenant. Comme je le mentionnais en introduction, juste le fait d’avoir pu compétitionner à ce niveau pour une deuxième fois cette année est une belle réalisation en soi. Ma course à Tiszy m’a permis de constater qu’il ne m’en manque pas beaucoup pour réaliser de belles performances à ce niveau et je ne garde en mémoire que du positif!

Lausanne WCS

En toute honnêteté, j’ai vécu mon expérience à Lausanne d’une façon totalement différente que celle à Tiszy. Peut-être était-ce dû au fait que j’avais déjà participé à une Coupe du Monde, ce qui rendait ma course à Tiszy un peu moins nouvelle, et/ou au fait que je me sentais bizarre et amorphe avant cette compétition, je n’en sais rien. Ce que je sais, c’est qu’à Lausanne, je me sentais comme une enfant qui allait vivre sa première compétition! J’étais emballée, excitée, enthousiaste! J’avais de la difficulté à concevoir que j’étais à Lausanne, avec la majorité des meilleurs athlètes en triathlon au monde et que je m’apprêtais à compétitionner avec eux! C’était surréaliste. J’ai l’habitude de vivre les courses de la WCS sur mon écran d’ordinateur, alors j’avais réellement peine à croire que j’allais en faire partie! J’avais tellement hâte de participer à cette course que j’en avais de la difficulté à m’endormir le soir (ou c’était peut-être aussi dû au fait que j’étais seulement avec des anglophones et que ma tête ne pensait sans cesse qu’en anglais…).

La journée de la course, en arrivant à la tente des athlètes, je m’émerveillais de voir que je me préparais pour la même course qu’Helen Jenkins, Barbara Riveros Diaz, Emma Moffat, Andrea Hewitt, Emma Jackson, nommez-les! Pour elles, tout semblait normal. De mon côté, je devrais plutôt dire que j’essayais d’avoir l’air que tout était normal en tentant de garder mes yeux ouverts d’une grandeur normale et en tournant ma tête à une vitesse normale pour voir tout ce qui se passait autour de moi. Au fond, il n’y avait absolument rien de normal! J’étais tellement heureuse de pouvoir prendre part à cette course. Je n’avais aucune attente. J’étais prête à plonger, tête baissée, et à donner tout ce que j’avais. Juste de penser que j’allais frapper et me battre, euh non je veux plutôt dire nager, avec les meilleures au monde, j’étais activée! Bien sûre, pour continuer d’avoir l’air normal, j’ai fait un échauffement. Pendant que je courais, les hommes en étaient à leur portion de course (leur départ était avant le nôtre). Je faisais mes éducatifs et mes accélérations, toujours en essayant d’être normale, mais… C’est Brownlee! Et Gomez! Et encore Brownlee! Ils sont juste là! Je pourrais leur faire une jambette! WOW! Euh non, pas de jambette, pardon, je m’emballe un peu. Bon, ça y est, j’ai vraiment pas l’air normal… mais je m’en fous! Je finis de placer mes choses dans la zone de transition, quelques mètres de natation et quelques tours de bras, me voilà prête à partir!

Quand l’annonceur nomme mon nom, je jogge vers le ponton où je choisis le spot #37. Directement au milieu. Non, ce n’était nullement stratégique. Je n’avais pas du tout pensé à l’emplacement que je choisirais. J’ai plutôt été attirée par le fait qu’il y avait une place de libre à côté de Nicola Spirig! Quelques instants plus tard, ça y est, c’est parti! Jusqu’à la première bouée, je nage aux côtés de Spirig! Je capote! À la bouée, c’est le chaos, mais je m’en fous! Je continue de tourner mes bras et de battre des jambes très fort. Après les virages des bouées, en débutant la dernière ligne droite, je constate qu’il y a un maillot vert Australie à ma droite. Non. Je rêve. Ça ne se peut pas. C’est Emma Moffat! Elle est à l’extérieur du gros peloton et remonte tout le monde. Dans mon emballement, je décide de sortir de la machine à laver et d’attraper ses pieds. Wow! Je suis dans les pieds d’Emma Moffat, trop génial! Bon, je l’avoue, cinq secondes plus tard je n’y étais plus… J’ai dû retourner dans la machine à laver, mais j’avais perdu de précieuses positions. Ça m’apprendra à m’emballer quand je vois Emma Moffat passer à ma droite dans l’eau… (!).

Malgré tout, je sors de l’eau avec plein de monde. Je me dépêche à aller chercher mon vélo et je connais une très bonne première transition. J’attrape les roues de Haug (GER) et de Kovacs (HUN) et mets mes souliers rapidement. J’avais été prévenue d’être patiente lors de la première partie du vélo. Cette section étant plate, tout allait se jouer dans la côte à 10,5% d’environ 500 mètres. Je me devais d’avoir de bonnes jambes pour donner tout ce que j’avais pour tenter de rattraper les filles devant. Dans ma première montée, j’avais tellement bien assimilé la consigne que j’ai littéralement attaqué les filles avec qui je roulais. J’ai travaillé très fort jusqu’en haut, mais j’étais vidée. J’ai eu besoin de la descente pour récupérer et j’étais incapable de prendre de relais. Malheureusement, le reste de la portion vélo s’est déroulé à l’image de notre premier tour : très fort dans la montée et plus rien après. Nous aurions fort probablement eu intérêt à en donner un peu moins dans la montée afin d’être en mesure de pousser fort aussi sur le plat.

En terminant le vélo, j’ai eu une très bonne deuxième transition. Première de mon peloton à entamer la course à pied, j’avoue que je ne suis pas restée longtemps à cette position… Je crois que mes jambes reposaient en paix dans la côte d’Ouchy (c’est comme ça que s’appelait la côte que l’on montait 4 fois)… Après avoir essayé tous mes trucs pour tenter de mieux me sentir en courant, j’ai dû m’en laisser au mode survie pour compléter mon 5km. J’étais tellement contente de franchir le fil d’arrivée! D’abord, parce que ça mettait fin à ma souffrance, je l’avoue, mais aussi parce que je venais de terminer une course de la WCS. Je n’y croyais pas! Je n’avais aucune idée de ma position, mais ça ne me dérange pas du tout. J’avais terminé ma première course en WCS!

J’ai adoré mon expérience sur ce circuit. J’ai réalisé que j’aimais le triathlon et que j’avais envie de poursuivre mon travail pour être en mesure de prendre part à d’autres compétitions de cette série. Les compétitions peuvent faire peur, mais j’ai appris à les vivre différemment lors de mon périple en Europe. N’étant pas une nageuse de premier peloton, les départs sont souvent très stressants pour moi. Je suis consciente que si je ne nage pas bien, je devrais travailler encore plus dur sur le vélo et à la course pour remonter. Vous me direz que c’est effectivement ça qui m’est arrivé dans mes deux courses et vous avez totalement raison, mais je n’ai pas vécu ma chasse de la même façon. J’ai appris à l’apprécier et j’ai constaté que mon travail a porté fruit étant donné que je suis beaucoup plus près qu’auparavant d’attraper un bon peloton. Je retire donc énormément de positif de mon expérience européenne et je me relance dans l’entraînement pour terminer ma saison en beauté avec la Coupe panaméricaine de Buffalo le 24 septembre et la Coupe du monde de Huatulco au Mexique le 9 octobre

2 commentaires
  1. Manon, un jour les nouveaux sur ITU seront tout fier de s’aligner a coté de toi. :-p
    Merci pour ton récit.