Un triathlète à la découverte du trail running / North Face Endurance Challenge.

Cela peut paraitre étrange pour un éditeur de contenu sur la triathlon, mais je suis présentement à la recherche d’un nouveau sport. La discipline triple remplie totalement ma vie mais elle la vide aussi, on parle des aspects financiers et familiaux. Le plaisir souffrant ne devrait pas avoir de prix.

Je crois aussi qu’il est important de varier les plaisirs. Évidemment, puisque le triathlon est multidisciplinaire je devrais être satisfait, mais la réalité est qu’avec notre niveau de forme, les possibilités sont beaucoup plus grandes qu’on le pense. C’est généralement assez peu dit, mais plus vous êtes performant et plus vous êtes en mesure de compétionner souvent. Il faut tout simplement accepter de faire des courses non prioritaires et avec un minimum de repos.

Faire des sports d’endurance, c’est avant tout un challenge qu’on se donne et être au dessus de la normalité, on s’entraine d’ailleurs dans ce but, non? Alors pourquoi ne pas varier les plaisirs. Quand j’entend du monde me dire qu’il ne peut faire telle épreuve parce que c’est trop tôt ou celle de trop ou que le profil n’est pas pour eux, je me dis que leurs prétentions ne sont pas à la bonne place et qu’on s’est tous un peu perdu. À la base, le triathlon est né sur un challenge, un défi dont on ne savait pas si cela pouvait être relevé, un fameux, t’es pas cap…

Depuis, avec son histoire, les triathlètes pensent avoir le monopole de la souffrance, et chez trimes.org, on vous répondra que tout est une histoire de dépassement sans mensonge. Essayer de dépasser sa limite, que ce soit courir un 3000m ou un ultra marathon, tous méritent le respect si l’effort et le dépassement est sincère.

La vie c’est comme ça, la recherche perpétuelle de l’impossible tout en acceptant les échecs et les réussites humblement.

Même si cela peut sonner comme un éloge personnelle, mon défi était de courir le 21km de Montréal et de faire le North Face endurance Challenge Marathon de Bear Mountain. Pourquoi? Parce que cela paraissait impossible et débile et que je me suis totalement fait endoctriner par le livre Running The Edge. Moi aussi, je veux être à nouveau jeune et me lancer des défis complètement cons et des pas cap’ à moi même.

Pourquoi le trail running? Pour faire changement, il y a quelque chose de rafraichissant de ne payer que 75$ pour une course. Pourquoi celle-ci? Parce qu’elle tombait bien dans mon calendrier et qu’il faut croire que je suis attiré par les fameuses séries (c0mme Ironman) qui malgré leurs défauts, sont souvent gage de qualité. J’aurai évidemment préféré faire une course au Québec, mais ne connaissant pas le milieu, j’ai voté pour la valeur sure.

Cela faisait un temps que la course en montagne m’attirait. Difficile de résister lorsqu’on voit Kilian Jornet ou les fameuses vidéos de Salomon. Une sorte de liberté et de folie. Réaliser l’impossible, hmm, c’est pas ça le triathlon longue distance?

Un peu comme les courses sur pistes, cela fait du bien de partir en se disant que personne ne part avec un avantage technologique certain. Une paire de chaussure de trail et GO!

La course se déroulait dans la région de New-York à 40km de la métropole. Le nom de la place Bear Mountain, cela me semblait totalement surestimé! Des montagnes, vraiment? Ah ces nord-américains…, je me disais que cela allait  être du même registre que le Mont-Royal! Pourtant, le site du North Face Challenge stipule bien que le niveau de difficulté est de 5 sur 5… hmm. Je me dis que c’est surement comme courir la montagne de Montréal 6 fois d’affilé avec un peu plus de difficulté, y a rien là…

Après 6h de route, on arrive à notre Motel. Chambre à 110$, encore une fois cela fait changement des surtaxes. Nous logeons à coté du paradis du Outlet. Elles sont ou les montagnes? Je ne sais pas.

On arrive sur la site après s’être perdu et s’être rendu compte que c’était le terrain de jeux des militaires. À première vue cela ressemble à une collection de grande colline… On ne voit pas grand chose tellement  la foret semble dense. En attendant le départ, on essaye de faire notre profilage, c’est plus fort que nous. Alors, il y a la catégorie Rambo, c’est verdict, il porte le bandana comme Silvester, T-shirt coupé au manche… Il y a le jeune qui est en école militaire, il a la coupe de cheveux militaire, ne porte pas de t-shirt afin de montrer son gonflement. Il y a le fameux hippy, il porte la barbe, les cheveux longs, et court sans t-shirt, à première vue, il voudrait courir tout nu d’ailleurs pour être encore plus proche de la nature. Cela fait contrastre avec le geek qui lui porte un sac a dos ou une fuel belt avec 5 bidons, il semble pret à camper si il le faut. Et il y a aussi le « Qu’est ce que tu fout là », celui qui pense que courir, c’est courir et qui montre fiérement qu’il faut autre chose que du trail, il porte un t-shirt Ironman ou Marathon Boston.

Même si il est facile d’en rire, personne ne semblait se prendre trop sérieux. D’ailleurs, on a vu personne faire d’échauffement ni d’étirement avant la course. À première vue, il est difficile de savoir qui semble être un prétendant. Lorsqu’on nous annonce, le départ, personne ne se presse pour se présenter. On avait l’impression d’être des étudiants ou personne ne veut s’assoir en avant.

On nous présente Mr qui a couru 1 marathon par jour dans tous les états américains. Il nous donne comme conseil de se méfier des roches, elles sont glissantes. Encore une fois, je me dis, toi tu exagères.

Le départ est donné, je savais que point de vue moteur, j’étais en mesure de suivre la tête… après mes études scientifiques sportatiennes. Pour une fois, j’étais dans la course, un dépassement est un dépassement. Cela commence, le parcours est assez facile pour commencer, je suis dans les hommes de tête, je suis excité. Cela commence a monter, le parcours est très accidenté, des roches partout, il faut vraiment regarder ou on place le pied, je réussi à suivre et là, on commence une descente, je ne pensais pas que cela pouvait être possible mais le chemin est simplement constitué de roches d’environ 20cm chacune, aucune présence de terre. Cela signifie que chaque appui peut se transformer en foulure surtout que les pierres sont très instables. Un marcheur trouverait ce passage pénible, et nous on doit courir dessus et en descente!!!

Je me rends compte rapidement que le trail running, c’est comme du motocross, tu peux bien avoir le meilleur moteur, le plus rapide, c’est celui qui prend le plus de risque et qui est meilleur techniquement. Une erreur peut-être fatale.

Après 5km, je cours avec une femme. D’apparence totalement anodine, elle a cette fameuse foulée magique, rien ne semble pouvoir l’arrêter. C’est d’ailleurs quelque chose de magique chez les meilleurs coureurs en trail, ils continuent leur chemin sans se poser de question, grimper dans les roches, pas de problèmes… sauter au dessus de la gadou, d’une rivière, etc… facile.

Ce qui est super étonnant, c’est que malgré que ce soit un marathon, la prise de décision doit tellement être rapide et avec tout ce qui défile, on a cette impression de vitesse et d’urgence.

Ma coureuse qui est en arrière de moi, me félicite en me disant qu’on a un pace parfait, dans la réalité, je sais qu’elle est derrière moi, elle me motive à courir dans les montées à 20% dans les rochers et à dérouler dans les descentes. Rapidement, je comprends que mon manque de technique pourrait causer ma perte. C’est à ce moment qu’elle me dit, « you need to trust yourself ». Elle s’est rapidement aperçu que je n’étais pas de ce monde avec mon centre de gravité proche des oreilles, je vacille, je heurte.

Je fini par la laisser partir quand c’est vraiment trop technique. Le parcours est une succession de montées et de descentes pour totaliser 1500m de dénivelé. Cela semblait impossible sur papier et pourtant mes jambes le confirment. Ce qui devait arriver arrivera. Première chute… deux genoux en sang, on aime ca, je recommence à courir tout de suite et mes deux nouveaux compères au look militaire m’encouragent. Malheureusement, je comprends qu’avec la fatigue, je risque de payer le prix.

Cela commence à ne plus être drole parce qu’il n’y a jamais de répits, des pierres partout, et même des sections ou il faut escalader. Sans parler des ruisseaux à franchir, des passages de gadou qui voudraient avaler mes chaussures. Il faut rapidement faire le deuil d’un pied au sec et accepter que cela redeviendra acceptable au bout de 300m.

Il est difficile de décrire le parcours par sa difficulté, je dirai simplement, que je n’ai jamais pu lever la tête pour regarder au tour de moi. Le paysage? Pas vu. D’ailleurs, le parcours est délimité par des petits rubans de couleurs. Je me questionne sur l’état de santé mentale de la personne qui a dû placer tout cela… surtout que certains courraient le 50 miles.

Le parcours est clairement impossible à faire en vélo. Il pourrait peut-être rouler sur 300m au gros maximum tant  il y a d’obstacles. Des arbres à franchir par le haut ou pas le bas. Ramper en dessous un arbre après 3:30 de course, c’est épic.

Incroyable, on voit finalement une intervention humaine sur le parcours, un pont, je le prend, et en le descendant, on retrouve nos amis les gros rochers et j’en profite pour y cogner mon tibia. Encore du sang, on aime ça, mais dans la réalité, j’ai vraiment la peur d’y rester. Je suis plus préoccupé par la peur de me blesser surtout que j’ai du me faire une 20aine de foulures… Je continue mais pas aussi fort.

L’art du trail running demeure dans la gestion des obstacles, être capable de résister à la tentation de faire les grosses montées à la marche et non dans une forme de power walking-running. C’est d’ailleurs dans ce milieu qu’on sépare les enfants aux adultes.

Tout cela passe très vite, les ravitaillement sont environ aux 8km. Chose étrange, il n’y a aucun indice sur la distance parcourue sur la parcours, alors les ravitos sont nos repères. C’est d’ailleurs un bar ouvert. Une collection incroyable de saveur de gels avec même du haut de gamme. On te propose des nuun, des patates, des smarties, enfin presque tout. D’ailleurs, avec ton sac à dos, il y aurait moyen de faire un profit sur cette course… si tu ramasses plein de gels a chaque ravitos… c’est de l’or!

Reste que je suis rendu au dernier ravito, un petit malin, that’s it. No more hills… it’s only downhill. Évidemment que cela était un bon mensonge, toujours ces fameuses roches et tous ses obstacles. La course semble interminable surtout que ma montre affiche 44km et toujours pas d’arrivée et que je suis dans une montée encore interminable…

Finalement, je vois l’arrivée, je cours jusqu’a la ligne avec une forme parfaite à 3:30 du kilo, fière de mon snobisme. Une medaille, un beau bidon Specialized Purist (le plus haut de gamme), et me voilà avec un super sourire.

Même si je n’ai fait que le marathon, certains couraient le 50 miles ou le 50 km, il est facile de se rendre compte que les meilleurs forment une famille. Encore une fois, personne ne s’est donné le role d’être un homme sandwich.

L’organisation était IMPECCABLE, vraiment. Site exceptionnel, tous les détails qu’on aime. Enfin, un t-shirt de qualité avec un discret North Face Challenge Endurance sur la manche. Chose certaine, la marque North Face ne rigole pas quand elle organise des courses parce qu’elle sait que son image en dépend. D’ailleurs, la course donne l’impression qu’elle débourse plus qu’elle ne gagne. C’est rare. On dirait que le marketing marche des fois et leur amour de l’aventure est sincère alors j’adhère.

Mon compagnon Vincent a très bien résumé l’affaire, c’était le fun mais je ne la recommande à personne. C’est d’ailleurs ce que je me suis dit. Jamais, je n’oserai refaire cette course tellement que cela semble inconscient. Je me demande d’ailleurs comment il est possible d’avoir assuré cette course… Surement qu’il se dit comme moi que Bear Mountain doit être une colline.

Alors, oui, je veux refaire du trail running mais un truc plus facile. Quoi? C’est pas toi qui dit qu’il faut sans cesse se challenger plus? Ah maudite contradiction… T’as une suggestion pour la surenchère?

Aussi, je tiens à dire que j’ai couru en New Balance MT110 et qu’elles m’ont sauvé la vie, rien de moins!

 

 

5 commentaires
      1.  » … je n’oserai refaire cette course tellement que cela semble inconscient » … oui c’est ça … tu vas faire le 50k l’an prochain!

        je suis déçu de ne pas avoir pu faire cette course, mais il y en aura d’autres

  1. Récit haletant qui nous met totalement dans l’ambiance. J’ai même eu mal pour toi au moment où tu rampes sous le tronc d’arbre !
    Comment se sont comportées les MT110 dans les passages rocheux ? La protection a-t-elle été suffisante ?

    1. Salut Roms, si tu fouilles le site tu verras qu on a fait l entrevue du designer de cette chassure. Il y a des photos de la fameuse plaque. Je te dirais que j’ai quelques fois senti les limites de la plaque mais que cela reste jouable si tu as une bonne technique… ce point reste anecdotique comparé a ses forces.