Avis > La super league – jugement final, la balle dans le camp de l’ITU.

Maintenant que la super league a réussi à passer du concept à la réalité, plusieurs questions s’imposent.

Si proposer trois jours de courses en direct avec une production très bien ficelée semble déjà assez pour convaincre la majorité des intéressés, est-ce vraiment nouvelle option viable pour le triathlon. Certains parlent d’une révolution, nous on préfère l’option d’addition. 

Trimes a pris le pouls entre différents acteurs chez l’ITU, mais aussi avec les athlètes. Contrairement à ceux qui étaient sur place, il s’est installé un certain scepticisme sur la suite des choses. Est-ce le fait qu’en cas de réussite, il existe une certaine crainte de ne pas être inclus ou de remettre en question un système déjà établi? Comme l’athlète anonyme l’a évoqué, est-ce que le sport doit vraiment évolué pour être plus spectaculaire s’il perd son intégrité? Est-ce que l’on récompense vraiment la performance?

Il faut plutôt le prendre de cette manière, le triathlon est dans une telle inertie où les amateurs ont une conception du sport au format olympique très figée, qu’il fallait proposer quelque chose de très différent.

On revient toujours au terrible jugement du terrible Lance Armstrong qualifiant le triathlon d’un shampoing, suivi d’une permanente puis d’une course à pied. Même si Trimes s’efforce de mieux décrire le sport et que les dynamiques habituelles des courses suivent des efforts à l’usure afin d’éliminer les meilleurs coureurs à pied avec des faiblesses dans l’eau, le message ne passe pas. Le problème avec les WTS, ce n’est pas le manque de spectacle, mais plus une question de retranscrire son intensité et ses moments décisifs. Il suffit de regarder des vidéos embarquées (vélo) pour se rendre compte que ces courses sont agrémentées d’une multitude de petits événements oubliés. 

Alors, si l’ITU ne parait pas assez spectaculaire, c’est justement parce qu’elle n’est pas en mesure de mettre en évidence lorsque des athlètes comme Mola ou Murray se font décrocher lors de la natation, ou encore le travail fait à vélo pour s’échapper.

Nous on rêve de nouveaux systèmes ou des drones suivraient tout simplement certains athlètes. Une infographie pourrait après retracer leur chemin dans l’eau. On rêve… pourtant, il n’y a rien de sorcier dans tout. Autre exemple, si certains athlètes comme Richard Murray offre leurs données sur Strava, pourquoi ne pas offrir ces données en direct. Le triathlon a besoin d’une offre comme celle de Velon qui offrait les chiffres en live de plusieurs cyclistes durant Milan San Remo. 

Malheureusement et ironiquement, avec du recul, on peut déjà se demander si la Super League n’en a pas fait trop avec son format sur trois jours et ses multiples formats. 

En fin de compte, on se rend compte que toutes les courses se sont jouées sur la dernière discipline, mais surtout, qu’il a fallu attendre la dernière journée pour voir des athlètes sortir de leur réserve, et encore…

Là où le concept s’est montré le plus défaillant, c’est qu’il était tout simplement impossible pour les athlètes de faire une différence que cela soit sur la natation et le vélo.

300m de nage avec une densité nettement plus faible permet aux athlètes plus faibles de limiter les dégâts et de profiter du drafting. Il aurait fallu concéder plus de 6 secondes au 100m pour décrocher un athlète, à ce niveau, c’est impossible. 

C’était aussi le cas à vélo puisque la boucle se faisait en deux temps et offrait un long temps de récupération après la section montante.

Est-il vraiment nécessaire de tenir une épreuve sur trois jours? Malheureusement, ce que l’on a remarqué, c’est que les athlètes étaient constamment sur la réserve. On est dans la spéculation, mais il devait surtout y avoir une certaine crainte face à l’accumulation des efforts sur trois jours. 

On a questionné l’un des tops athlètes sur le circuit pour savoir s’il y voyait un enjeu sportif, sa réponse, tu viens, tu prends ton argent et tu cours…

Face à l’inconnu, on peut imaginer que certains athlètes souhaitaient avant tout ne pas prendre de risque pour la suite de la saison. Cela reste l’ITU qui leur permettra de signer des contrats et de renouveler leurs ententes avec leur fédération.

Alors durant ce week-end, on n’a jamais véritablement vu Javier Gomez. Pourtant, l’espagnol a presque trop facilement gagné la première série mondiale de la WTS.

Difficile de croire qu’il était à court de formes. Un décalage horaire mal négocié? Probablement, si cela est le cas, cela démontre que les athlètes joués le jeu. D’ailleurs, Alistair Brownlee avait clairement l’esprit ailleurs et ne s’est pas présenté avec son poids de course. On comprend d’ailleurs pourquoi, il évitera les premières séries mondiales de l’année. Le Britannique n’est pas du style à courir pour courir….

Il y avait aussi des problèmes dans le concept. Le contre à la montre à vélo pour l’équalizer, ou la poursuite, si vous préférez a rapidement été neutralisé. En à peine un tour, tous les meilleurs s’étaient regroupés et attendaient la course à pied. Finalement, on a jamais eu le sentiment que ces différents formats récompensaient l’athlète le plus complet mais surtout celui qui était le plus fort dans la dernière discipline. Richard Murray est clairement celui qui a la meilleure transition entre vélo et course à pied. Sa victoire est plus que logique. Il n’avait d’ailleurs pas besoin de pointer son nez à l’avant à vélo… Malheureusement, pour nous, le triathlon, ce n’est pas juste cela. 

Donc, si le plateau sur papier semblait si compétitif, on n’a pas eu de véritable lutte. D’ailleurs, après les deux premières journées, il était presque impossible de faire tomber Richard Murray pour le titre. Mais surtout, on n’a jamais eu le sentiment que les autres ont pris des risques pour gagner à quelques exceptions comme Jake Birtwhisle. 

À un moment donné, on s’est même demandé si les athlètes comprenaient le système de classification pour attribuer un vainqueur final.

Mais, la plus grande déception du week-end, c’est que l’organisation n’a toujours pas toutes les cartes dans ses mains. Elle n’a pas été en mesure d’annoncer officiellement une prochaine étape. De plus, lors de cette course australienne, elle n’avait pas de véritable sponsor majeur. Tout est encore à faire.

Maintenant, la seconde problématique c’est que plusieurs de ses têtes d’affiche comme Alistair Brownlee et Javier Gomez pourraient ne plus être disponibles prochainement puisqu’ils passeront à la longue distance. 

Mais au final, la super league vient surtout d’offrir des arguments à l’ITU pour apporter des changements. 

Rappelez-vous de la récente polémique entourant le projet du passage de la distance olympique à sprint pour les prochains JO. Dans les faits, l’ITU espère avant tout l’inclusion du sprint aux Jeux de 2024 (Paris ou L.A.) et cela se fera avec des manches qualificatives. 

Cela fait d’ailleurs plusieurs années que l’ITU milite pour cela et ce format est déjà utilisé pour une coupe du monde. Maintenant, avec l’arrivée de la Super League, on peut imaginer que certains organisateurs de WTS soient désormais tentés par cette expérience et ignorent certaines contraintes logistiques comme une fermeture prolongée des routes.

En 2018, la série mondiale aura deux nouvelles destinations. Est-ce le bon moment?

Regarder ailleurs…

On revient toujours aux mêmes points. Le triathlon a sans cesse le besoin de chercher pour des nouvelles formules. Malheureusement, on collectionne les essais manqués alors que d’autres sports établis comme le golf, le tennis et le ski de fond ont déjà trouvés les bonnes formules. 

Le Ski de fond avec son sprint (course avec plusieurs rondes) et le format poursuite a déjà trouvé la formule parfaite pour générer un meilleur spectacle. Dans le passé, le monde trouvait aussi que ce sport manquait de spectacle… 

 

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