La récupération, le nouveau mot interdit?

Steve Magness est probablement le coach d’athlétisme le plus intéressant à suivre. Il donne l’impression d’être constamment en soutenance. Il publie ses idées pour lancer des débats, là où certains sont toujours dans la culture du secret. Poser des questions est rarement associé à un entraineur qui a une compréhension totale de son sport.

Dans l’un de Ses derniers articles, Steve fait tout simplement de la philosophie sur le terme de la récupération. Tout cela est très logique. Encore hier, je lisais un texte dans lequel l’entraineur expliquait que l’athlète progressait non pas lorsqu’il s’entrainait, mais pendant sa récupération. Mon ancien entraineur avait cette analogie, il ne faut pas arroser une plante si l’eau n’a pas été absorbée. 

Il en demeure que la récupération est devenue un business. Il existe une multitude de procédés comme la cryo, la compression, la nutrition, l’auto-massage ou encore l’électrostimulation pour accélérer la récupération. L’argument de l’industrie est simple, plus l’athlète récupère rapidement, plus il sera disponible pour s’entrainer et en faire plus.

Selon Steve Magness, il faut faire très attention aux termes utilisés. Ils donnent l’exemple de ses athlètes. Avant une course, lorsqu’un athlète semble être stressé, l’entraineur lui demandera systématiquement de de relaxer. Selon Magness, c’est un très mauvais conseil parce que la signification est tout simplement inversée. Ce fameux « essaye de te relaxer » vient en fait souligner le fait que l’athlète est loin d’être en contrôle et confiant.

Comme le mentionnent plusieurs recherches, le dopage cérébral existe et risque d’être le sujet de l’heure aux prochains Jeux Olympiques. Le principe est d’agir pour que certaines données reçues par le cerveau ne soient plus traduites en commande pour ralentir. Évidemment, certains signaux sont généralement donnés pour avertir que le corps est en danger. Mais, dans la majorité des cas, l’athlète se met tout simplement des barrières psychologiques.

Dans ces cas, l’athlète serait trop à l’écoute de son corps et s’inventerait des sensations en course quasi improbables. Résultat, il n’est pas en mesure d’exploiter tout son potentiel athlétique en course. On termine rarement une course avec le sentiment d’avoir tout donné. 

Notre gestion du stress agit directement sur nos performances.

Et voilà le sujet de réflexion de Steve Magness: entre les entrainements, il faut prévoir un période suffisante pour récupérer. Nos montres si intelligentes nous conseillent d’ailleurs la même chose. Il faudrait plutôt parler d’adaptation. L’athlète s’entraine pour provoquer un état de fatigue, le corps réagit en surcompensant. Il s’adapte en devenant plus fort. 

Dans les faits, la récupération, c’est un terme qui devrait être utilisé lorsque l’athlète revient d’une blessure. Il serait en réparation…

Pourtant, entre des entrainements, on dira tous qu’on est en « récupération. » Mais contrairement  au terme « adaptation », avec « récupération » on ne comprend pas que l’athlète est dans une phase où il finira par progresser. 

La récupération donc, est tout simplement vue comme une période où l’athlète a besoin de stopper toute activité pour être en mesure d’être assez en forme pour continuer l’entrainement. 

Cette distinction entre adaptation et récupération fait pourtant toute la différence. En mettant l’accent sur la récupération, et donc ce besoin d’être à nouveau opérationnel, on vient créer une certaine dépendance face à un état souhaité et finalement improbable. Pour récupérer parfaitement, il faudrait multiplier les journées sans sport. 

L’athlète s’est donc forgé comme idéal de commencer tous ses entrainements dans un état parfait. Sans douleur, et comme on le mentionnait,  avec comme conséquence que l’athlète finira par écouter des signaux qui le limiteront. 

À l’image d’une course où on est presque trop à l’écoute de son corps. Un simple moment de petit moins bien est très souvent fatal. Ce phénomène vient tout simplement se répéter à l’entrainement. L’athlète est dépendant d’une illusion de perfection.

Est-ce qu’une séance à basse intensité doit être faite en pleine fraîcheur? Non. De plus, comme on l’a fréquemment mentionné sur Trimes, c’est uniquement en s’entrainant plus que l’athlète récupère s’adapte plus rapidement. Utiliser des aides, vient atténuer cette capacité à avancer sur ses acquis. 

L’important est avant tout de savoir déceler le type de douleur. La fatigue chronique et une douleur dans une zone précise (blessure) ne devraient pas être interprétées au même niveau que des jambes lourdes. L’athlète doit donc être en mesure de faire la distinction dans ses maux. 

Évidemment, tout cela n’est pas une recommandation pour s’entrainer sans limites et en se mettant dans des états minables.

L’objectif de cet article est surtout de faire comprendre à l’athlète qu’il ne doit pas être affecté par des sensations ordinaires. Au contraire, le fameux mal aux jambes est synonyme d’adaptation et donc de progrès et non comme un besoin de passer au réparateur. 

Est-ce que cela signifie que l’athlète doit se dissocier de sa perception? En partie, oui, tout au moins il doit accepter l’imperfection et comprendre le processus. 

Comme on le dit fréquemment, les meilleurs athlètes sont ceux qui sont capables de tolérer un inconfort. 

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