La longue distance vers une uniformisation, tous coupables?

Trimes se fait fréquemment critiquer pour son ton alarmiste face au développement économique de la longue distance. Il y a déjà 2 ans, on se questionnait si le sport favorisait déjà une certaine élite sociale. Pour une fois, le magazine américain Outside ose s’attaquer à la WTC en se demandant si l’esprit du triathlon existe toujours.

On est effectivement dans une période de changement, une course mythique comme Escape From Alcatraz vient de voir son prix d’inscription passer de 450$ à 750$ en une seule année. Alors que le silence de l’organisation pouvait nous laisser présager que l’augmentation était le fruit d’une administration d’une ville plus exigeante, on peut remettre en question cet argument puisqu’une autre organisation (Tri California) offrira à nouveau sa réplique pour 400$.

IMG, propriétaire d’Escape From Alcatraz, sait que même en augmentant son inscription, elle affichera complèt (limité à 2400).

Mais ce phénomène est encore plus flagrant dans la longue distance. Il faudra s’y faire, les courses indépendantes d’envergure en Amérique du Nord sont en perdition. Silverman, Vineman, Big Kahuna, SuperFrog sont toutes des courses qui ont fini par agiter le drapeau blanc. Face à la concurrence d’Ironman, elles ont vu le nombre d’inscriptions en baisse constante.

Pas juste une question de l’offre et de la demande. 

Le passage d’une course comme Challenge Atlantic City sous Ironman, a permis a son organisateur de passer d’une course avec moins de 400 athlètes au départ à sold-0ut après 2 jours et même si les frais d’inscriptions sont nettement plus chers, les triathlètes ont une confiance totale envers Ironman et cela reste justifié.

Mais dans l’exercice, les courses indépendantes sont en extinction. Même ceux qui veulent résister doivent alors se contenter à des événements devenus presque anecdotiques avec moins de 300 athlètes au départ.

L’augmentation du nombre des courses Ironman en Amérique du Nord a tout simplement été fatale à ces concurrents. Challenge en a rapidement payé le prix et tout le monde a sous-estimé la force du logo M-Dot d’ironman. Même en offrant des courses à moitié prix avec d’excellents parcours, le triathlète considère que l’expérience n’est pas comparable avec celle d’Ironman.

Évidemment, la WTC est une compagnie qui a le droit de faire de l’argent. Il en demeure que le sport est devenu exclusif et la longue distance ne peut plus prétendre d’être un sport populaire. La qualité des courses de la WTC est constante, ce qui n’est pas toujours le cas avec les courses indépendantes. Malheureusement, maintenant que les courses ne sont plus organisées par des clubs, les retombées ne permettent plus de financer leurs activités. On y perd l’engagement des communautés.

Face à un apport financier si important pour l’athlète, il n’est pas étonnant de voir une clientèle qui est continuellement en renouvellement, synonyme d’une partie de la clientèle qui ne reste pas.

Est-ce que le triathlon se doit d’être un sport élitiste?

Dépenser 750$ pour s’inscrire à une course reste une dépense importante pour certains budgets, sans compter la pression à dépenser en matériel. Comme on l’a déjà mentionné, Ironman a su articuler sa magie autour de Kona en jouant avec l’exclusivité. La concurrence ne semble pas être en mesure de proposer des arguments pour alimenter une divergence.

De plus, le pouvoir économique d’Ironman a démontré qu’elle pouvait se porter acquéreuse ou facilement éliminer la concurrence. Le cas de Challenge Bahreïn est un autre exemple.

À votre avis, quel serait le succès d’un Ironman Embrum ou Ironman Alpe d’Huez?

Une alternative qui n’existera bientôt plus? Même si Challenge continu à faire de la résistance, son modèle économique n’est pas stable. Les organisateurs se contentant de payer un frais de licence, la qualité des événements n’est pas toujours au rendez-vous. Certaines courses se sont rapidement rendus comptent qu’elles se faciliteraient la vie en passant sous l’étendard Ironman.

Malheureusement, ses pratiquants ont accepté cette dérive, et même si le triathlète est dans un certain déni, la longue distance n’offre pas un environnement synonyme d’accessibilité.

Une question de branding?

Ironman est devenu une marque reconnaissable et même par les non-convertis. On imagine que les réseaux sociaux et notre vanité nous ont poussé à notre perte. La résistance de certains événements en France peut certainement s’expliquer par leur visibilité par un traitement médiatique très local ainsi que ses reportages télévisuels qui est une tradition distincte des courses indépendantes dans l’hexagone.

On se répète, on rêve toujours de s’aligner à Ironman France ou autre, enfin pour cela, il faudrait avoir les moyens financiers. Allez courir dans une course indépendante sans niveau, donne rapidement des envies d’aller voir ailleurs. Le trail est justement une alternative qui pourrait aussi tomber dans ce travers.

Est-ce que le phénomène américain finira par se répéter dans les autres régions du monde?

Toujours toujours.

La récente acquisition de la WTC par le groupe chinois Wanda nous fait croire qu’un changement est possible. Sport socialement populaire ou élitiste? Sachant que ce n’est qu’une question de temps avant qu’Ironman soit l’unique organisateur en longue distance à quelques exceptions près, est-ce que nous les athlètes pouvons encore avoir notre mot à dire pour que le sport triple reste accessible?

5 commentaires
  1. Il n’y aura jamais d’Ironman Embrun… ou alors pas avec le parcours actuel. Pour que le système Ironman fonctionne, il faut des courses faciles. Le pimpin moyen qui est prêt à mettre 700€ pour avoir son t-shirt finisher, il passera jamais le vélo sur le parcours actuel.

    1. Sebenfer, je trouve ta réponse nauséabonde…..car Embrun ne fait rêver que les triathlètes français et les pimpins moyens sont bien plus fort que tu ne le penses…..il te faut aller te frotter sur les courses Ironman organisées en Allemagne, en Suède, Suisse, Dannemark, etc….et tu verras alors la densité du niveau….. Faut pas critiquer quand on connaît pas…. Compare ce qui est comparable. Embrun reste une course francophone. Le Norsman affiche complet et sur des critères de sélections pas très cool pour le commun des athlètes et est une course très particulière qui ne fait rêver que ceux qui aime le froid et la pluie. Le parcours vélo à Embrun est dur oui, mais pas insurmontable. As-tu déjà fait Lanzarote avec un vent pas possible et un dénivelé de 1700m. Le vent est bien plus usant que de monter à vélo. Sur certains parcours tu pédales en permanence sans jamais pouvoir te relâcher, c’est bien plus usant que de faire un col et de se reposer en descente pour remonter à nouveau. alors sur ceux le pimpin te salue et te souhaite une bonne saison 2016

      1. Mon commentaire est volontairement provocateur… mais la densité que tu évoques, je ne la vois pas… enfin pas partout. En 2015, à Francfort, le 11 ème a pris son heure dans la tête par le vainqueur… tout comme à Embrun. Après oui, derrière il y a la densité… de ceux qui peuvent claquer 1000€ sur un week-end de course. Nul doute qu’elle serait encore bien plus importante si le ticket d’entrée était plus accessible. Nul doute qu’aujourd’hui, la sélection pour Kona se fait sur l’épaisseur du portefeuille bien avant de se faire sur le niveau sportif.
        Et puis de toute façon l’esprit nauséabond du triathlète ironman a déteint sur toutes les courses de long. Le moindre half perdu, Embrun… ne sont plus que des prétextes à exhiber ses t-shirts de finisher… quand bien même on a couru le marathon en 6h.

  2. « … est-ce que nous les athlètes pouvons encore avoir notre mot à dire pour que le sport triple reste accessible? »
    > Oui, bien sûr, seuls les athlètes décident : en s’inscrivant à des courses indépendantes organisées bénévolement par des clubs sans se cacher derrière le « oui mais l’ironman c’est bien organisé, il y a des goodies etc. ».

  3. Personnellement j’ai décidé d’arrêter d’enrichir la WTC qui augmente sans cesse les tarifs de ses courses, et propose parfois des circuits sans intérêt pour l’athlète. Il y des courses labellisées « Challenge » qui n’ont rien à enviées à celles d’IM et qui restent moins onéreuses, et il y a aussi et surtout de belles épreuves sans label qui n’ont peut-être pas une organisation sans faille mais qui sont bien plus conviviales, qui proposent des parcours magnifiques et qui ne vous assèche pas le porte-monnaie ! (Embrun, Alpes d’huez, Natureman … et pleins d’autres encore) Et ça fait vivre les structures « locales » qui les organisent … Ça fait 20 ans que je suis triathlète, aujourd’hui le business de la WTC me dégoutte.