Édito > Une course pleine…

Depuis 2012, Mont-Tremblant agit comme le poumon du triathlon québécois. Avec ses 3250 inscrits pour son 70.3 et sa course 5150 la veille, cette destination des Laurentides peut s’autoproclamer comme l’événement de triathlon le plus populaire de la francophonie. Ce succès reste totalement justifié tant la qualité de l’organisation est au rendez-vous.

Édition après édition, l’équipe de Dominique Piché nous réserve des nouveautés avec toujours le même objectif, offrir la plus belle expérience possible à l’athlète. Entre le passage du Jet pour lancer départ ou l’organisation qui souhaite payer pour l’empreinte carbone de ses compétiteurs, personne ne peut rivaliser. L’effort est total et rassembleur, maintenant comment y résister. En voyant le spectacle, difficile de faire preuve de patience face à tant d’attraits. Le plein est fait.

Pour Trimes, couvrir cette course reste un exercice atypique. Les 10 000 pages quotidiennes de Trimes dans la francophonie ne semblent pas peser lourd. Après, le journalisme n’est pas un exercice de popularité et voir des « collègues » prendre des égoportraits avec des pros, cela ne sera jamais dans les habitudes de la maison. Notre rôle est d’informer et non d’obtenir des passe-droits pour son intérêt personnel.

Même s’il est toujours appréciable de recevoir une petite tape dans le dos et que l’on pense aussi avoir un impact positif sur le sport, ce geste ne vient plus des gens d’ici.

Avec les différents investisseurs de Trimes, on a fréquemment ce débat, face à cette crainte de ne pas toucher tout le monde. Nos articles doivent s’adressent à tous, du débutant à l’élite, point final.

Il reste que la connexion ne se fait pas et en regardant la course, face aux différentes pratiques d’une majorité, ces athlètes ne semblent pas avoir fait leurs devoirs et sont très mal informés.

Alors, on a donc cette hypothèse, Trimes n’est pas en mesure de toucher ce fameux triathlète qui est juste de passage. Sans vouloir dénigrer ce nouveau venu, il est généralement arrivé dans le sport sur un coup de tête et comme un objectif de reprendre le contrôle sur son corps. Son but est avant tout de finir ce challenge que représente une course longue distance.

Dimanche dernier, j’ai été frappé par plusieurs événements. Des athlètes qui arrêtent de nager après 30 mètres ou qui ne finissent même pas la natation. Une volontaire confira plus tard son incompréhension face à tous ces athlètes qui doivent arrêter de nager après seulement 200 mètres dans la course. Difficile de croire qu’ils ont déjà nagé la distance et plus à l’entrainement. N’est-ce pas le rôle d’un coach de les dissuader à faire la course?

Effrayés par la densité, plusieurs décideront de nager sur le dos pour récupérer leur souffle et limiter leur stresse. Même si l’on pensait que les départs en vague allaient rendre les athlètes plus espacés, ce n’est pas réellement le cas puisque les plus rapides sont rapidement frustrés à devoir accumuler les dépassements. Certains ne se gênent plus pour faire des gestes disgracieux.

Malheureusement, la vieille, un accident est bien survenu. Un athlète a fait une crise cardiaque et a été sorti de l’eau inconscient. Déjà en mai dernier à Chattanooga 70.3, un athlète a trouvé la mort durant la natation.

Face à ces raisons, on peut toujours mettre en cause le fait qu’aucun test médical ne soit nécessaire pour prendre le départ d’une course de ce type. Il ne faudrait pas surcharger le système médical avec ces tests, cela reste l’excuse qui tient dans le milieu… Reste qu’avant tout, il y a un travail de conscientisation à faire.

Même si la crise cardiaque peut surgir par le mouvement du bras violent entrainant le blocage d’une artère ou encore la submersion dans l’eau froide créant un oedème au coeur et qu’il y a effectivement des fatalités. La crise cardiaque n’est pas provoquée par un effort trop intense ou trop violent, mais avant tout par un environnement trop hostile. Dans certains cas, l’arrêt cardiaque est la conséquence de l’accident et non l’origine.

On peut donc croire que c’est le manque d’expérience en eau libre ou le manque d’entrainement qui vient créer ces conditions. Tout cela est possible par le fait que l’athlète n’a pas une réelle compréhension face au challenge. Triathlon Québec offre désormais des cliniques gratuites pour nager en eau libre au parc Jean-Drapeau. Cela fait parti des petites étapes nécessaires à compléter avant d’entrevoir prendre le départ d’une course avec une densité plus importante.

Un autre aspect nous a marqué, en se plaçant à la première côte sur le parcours à pied, à peine 500 mètres après le départ, la majorité des athlètes la marchait. Effectivement, cela peut être une simple stratégie qui peut s’avérer efficace, mais tout de même.

Cela m’a remémoré mes débuts en triathlon. J’ai toujours eu ce sentiment que ce sport était une excuse pour devenir un athlète plus complet. L’objectif est donc d’être fort dans les 3 sports, sans faille.

D’ailleurs, même avec les élites, lorsqu’une star du circuit n’est pas dominant dans les trois disciplines, cela est toujours souligner par ses détracteurs.

Alors pour moi, être un vrai triathlète, c’était de ne pas abandonner. Pas de ne pas finir la course, mais bien de courir sans s’arrêter. De vaincre cette petite voix en soi. La satisfaction d’avoir offert un effort complet, une course pleine.

D’ailleurs, peut-on se considérer marathonien ou être fier de son effort si on a marché une section? Malheureusement, en triathlon, cette culture nous échappe. Beaucoup ont ou n’ont jamais eu cet objectif de faire une course pleine.

Quand on y pense, la limite de temps traditionnelle de 8h30 sur 70.3 signifie justement qu’il est possible de compléter cette course sans entrainement spécifique. Malheureusement, nombreux prennent ce risque. Finir une épreuve en 8 heures est vu comme un acte de courage alors qu’il pourrait aussi être vue comme un acte d’inconscience.

C’est un peu comme se lancer dans l’ascension d’une montagne sans la connaitre et sans équipement.

Évidemment, le sport ne doit pas être élitiste et ironman reste cette invitation à une vie plus active, mais ne doit-il pas devenir plus sécuritaire avec des athlètes qui respectent la distance. À écouter des gens fiers d’avoir terminé leur course en n’ayant jamais dépassé une durée d’une heure à vélo, il y a quelque chose qui nous échappe.

Cela démontre aussi qu’il y a un travail à faire sur l’image du sport. Être accessible oui, mais on doit rééduquer les athlètes à respecter le triathlon et faire preuve de protectionnisme.

Et il y a aussi le côté éthique du sport. On ne se le cachera, en lançant 3250 athlètes sur une course, ceux qui sont rapides et qui partent dans les derniers sont en danger. Le plus triste dans tout cela, c’est que même si la densité ne permet pas aux athlètes de garder leur distance, certains profitent de ceux qui les doubles pour les suivre. Le fameux yoyo.

J’en reviens toujours au Golf. Le joueur connait les règles et les respecte à la lettre. Il est interdit de parler à son coach durant une épreuve. Durant la course, je voyais tous ces coachs courir avec leurs athlètes, leur parler, fournir de l’eau, allant juste qu’à les pousser. Évidemment, ils ne sont pas là pour la course, mais est-ce que ces agissements ne sont pas à l’origine de tout. Les règlements sont secondaires et voilà.

Malheureusement, Tremblant a aussi été sujet d’une collision majeure à vélo. L’un d’eux se retrouve avec une commotion cérébrale, fractures, dents cassées, la totale. Dans son cas, il n’a pas pu éviter des athlètes déjà à terre. Encore là, la densité est peut-être l’origine de tout.

Ce jeune partait dans la dernière vague. Pour un athlète performant, cela peut se traduire par 2000 dépassements. Malheureusement, c’est là qu’une course pleine avec des athlètes qui veulent faire une course pleine payent pour ceux qui ne sont plus pour cela.

2 commentaires
  1. Bel article. Je partage les idées mentionnées. Je pense que les novices (voir pour certains leur premier triathlon) ne se rendent pas compte de l’effort à produire, et d’autant plus sur un 70.3. Une épreuve sportive doit être préparé un minimum. C’est inconscient de partir en ayant nager 2 fois dans l’année, pédaler 3 fois et couru 5 fois. Le triathlon ne doit pas être vu comme une course banal du dimanche, c’est un vrai triple effort à produire. D’ailleurs pour découvrir le triathlon, il est fortement conseillé de commencer par un S voir XS.

  2. Les départs devraient tout simplement être divisé selon la vitesse et non selon le groupe d’âge, comme dans les marathons.