Édito > Tous avec Emmie, tous avec Audrey.

La semaine dernière a été riche en rebondissements. En quelques jours, Emmie Charayron s’est vue forcée d’abandonner le rêve d’être olympienne pour une seconde fois. En tant que remplacante désignée, Audrey Merle a donc hérité du dossard qui lui permettra d’être au départ de la course le 20 août prochain.

Comme toujours, beaucoup de choses ont été dites. À un certain moment, on pensait même tenir la suite de DTN d’un jour arrète ta propagande, tellement on continue d’être étonné des jugements de certains.

Avant tout, nos pensées devraient être dirigées vers Emmie. Les Jeux Olympiques ont un impact démesuré dans la carrière des élites Pour beaucoup, ne pas être présent et/ou ne pas performer aux JO laisse un goût d’inachevé.

Pendant plusieurs mois, les attentes envers Emmie étaient de taille. Elle devait combler un vide entre 2 générations. Parmi les grandes nations du triathlon que sont l’Espagne, l’Allemagne, les États-Unis ou encore la Grande Bretagne, la France était la seule à devoir se contenter d’un unique dossard féminin.

Et pourtant la sociétaire de Sartrouville a réussi. Après une longue période de doutes qui a suivi ses premiers Jeux Olympiques alors qu’elle n’avait que 22 ans, elle a su revenir. On a redécouvert son sourire. Emmie s’est retrouvée.

Privée de test event à Rio ainsi que de grande finale à Chicago, là encore elle aurait pu se décourager. Mais elle a fait preuve de résilience et malgré un autre fait majeur qui nous marquera pour toujours, elle avait gagné sa sélection olympique.

Mais voilà, avec cette ambition – justifiée – de vouloir se présenter à Rio à son meilleur niveau, une ligne a été franchie. Cette blessure agit comme un séisme sur une ville qui viendrait d’achever sa reconstruction.

Quand un élite ne remplit pas ses objectifs, il peut ressentir un sentiment de culpabilité face à son entourage. Et ni l’athlète ni son entourage n’est vraiment préparé pour gérer ce genre de situation. Gardons à l’esprit qu’Emmie est cette athlète qui méritait d’être aux JO et qui a tout pour avoir une très belle carrière, JO ou pas. N’oublions pas non plus l’individu derrière l’athlète, qui ne mérite pas d’être isolé(e) parce qu’il/elle n’est plus aux rendez-vous sportifs.

Presque logiquement, Audrey Merle, seule remplaçante identifiée à l’issue du processus de sélection, se voit désormais projetée vers Rio. Son rêve olympique était pourtant très compromis après une contreperformance en Chine. Dans cette lutte au dossard, les prévisions étaient probablement trop pessimistes. Face au plateau présent lors de la dernière série mondiale avant la fin de la période de sélection (Yokohama), Audrey Merle a facilement démontré un niveau de performance qui lui aurait permis d’obtenir son propre dossard olympique. Mais la FFTri avait préféré ne pas faire dans l’acharnement. Pour l’actuelle championne du monde U23 le temps est de son coté et précipiter un développement peut être fatal. Des anciens champions du monde américain comme Lukas Verzbicas ou Tamara Gorman en ont fait les frais. Le risque existe donc, certes, mais au delà de quelle limite le protectionisme n’est-il pas exagéré?

La sélection d’Audrey Merle a pourtant fait couler de l’encre. Pour certains, Cassandre Beaugrand était l’élue et cette non-sélection est une injustice.

Trimes préfère se baser sur du factuel. Cassandre Beaugrand n’a jamais effectué de course en distance olympique. À 19 ans, cela peut surprendre pour une athlète de ce niveau. Pourtant dans le projet olympique début 2015, la transition a été retardée par plusieurs aspects puis a suivi une saison mi-figue mi-raisin. Évidemment le talent est indéniable. Et voyant sa grande rivale et ainée d’un an, Laura Lindemann, sélectionnée, Cassandre a sans doute le sentiment d’être passée à coté et elle le fait savoir.

Dans le magnifique milieu de l’ITU où ce sont les fédérations qui inscrivent les athlètes, il y a des règles à respecter et des procédures à suivre. Et lorsqu’un athlète n’est pas en accord avec une situation, il existe des recours. C’est d’ailleurs d’actualité avec le Canada ou l’Allemagne. L’athlète peut faire appel. Dans le cas de Cassandre, elle aurait du se manifester plus tôt, sur le fait qu’elle n’était pas nommée comme remplaçante.

Un athlète qui critique publiquement une décision ébranlera forcément les différents acteurs impliqués. Ici c’est d’autant plus problématique qu’Audrey et Cassandre évoluent dans le même groupe.

Les rivalités entre athlètes sont nécessaires et logiques mais elles doivent rester saines et ne pas déborder en dehors des courses. La faute à l’entourage qui n’est pas capable de contenir l’athlète en question?

De plus, même le niveau de performance d’un athlète reste théorique. A moins d’être un Brownlee ou Flora Duffy et d’avoir les ressources pour contrôler une course, un résultat découle de plusieurs facteurs.

Par les derniers événements, Audrey Merle se voit donc récompensée pour son travail studieux. Évidemment, elle a hérité de la place d’Emmie mais ne perdons pas de vue son parcours. Gagnante du titre mondial U23 à seuleument 20 ans, médaillée sur une coupe du monde ITU et percant le top 20 sur une WTS en CD cette saison, l’avenir est aussi de son coté.

Tous ceux qui mettent en doute sa sélection viendront la pertuber. Avec le mauvais sort d’Emmie, avons-nous réellement besoin d’une seconde victime? Alors soyons tous derrière Emmie et Audrey pour leur souhaiter de très belles années en perspective.

Soyons aussi clément pour Cassandre tout en restant conscient des conséquences. La plus belle des réponses, c’est en faisant parler ses jambes.